À la hauteur fluviale de Rivière-Madeleine, l’eau du Saint-Laurent s’enrichit d’une matière blanche et discrète, longtemps oubliée dans son omniprésence : le sel. Ici, le fleuve, le vent et la chaleur solaire s’unissent dans une lente alchimie, façonnant une ressource aussi délicate qu’inépuisable.


Le littoral gaspésien porte encore les traces d’une économie halieutique révolue, fondée sur les traditions du salé et du séché. Le quai déserté, le hangar muet et la toponymie parlante composent un paysage suspendu, chargé de mémoire.


C’est dans cette trame identitaire que s’inscrit le projet de revitalisation territoriale : une micro-industrie saline, ancrée dans les pratiques passives et pensée à l’échelle du lieu. Plus qu’une simple industrie, le projet se déploie comme un parcours structuré en six séquences : captation, filtration, cryoconcentration hivernale, concentration par le vent, évaporation estivale, conditionnement. Chacune répond à une dynamique climatique spécifique. Le cycle de production optimise ainsi l’énergie naturelle du climat québécois pour une récolte saline annuelle.


L’architecture se compose au rythme des saisons : elle s’ouvre ou se ferme, modulant la température et la lumière, tirant parti du froid comme de la chaleur. Son enveloppe bâtie dialogue avec l’esthétique industrielle locale, tout en révélant une intériorité fonctionnelle et filigrane, pensée pour accueillir aussi bien le geste de production que celui de la contemplation.


Par des parcours, des points d’observation et des espaces d’interprétation, le projet invite le visiteur à renouer avec le lieu : à le parcourir, le comprendre, et l’habiter autrement. Ainsi, entre matière, climat et mémoire, l’architecture devient récit, un outil modeste, ancré dans le territoire, capable de retisser le lien entre un lieu et ceux qui l’habitent.