


Claudelle Larose-Roger
Unité 9
Supervisé par Jean Verville
La défiguration des imaginaires
Et si l’on pouvait voir la vie au-delà des imaginaires de l’enveloppe?
E(P)
Cet essai-projet explore le détachement croissant de l’être face aux imaginaires corporels et architecturaux idéalisés, façonnés par une normopathie sociétale qui tend à invisibiliser les singularités et à lisser les aspérités et irrégularités propres à l’humanité. Il interroge la manière dont ces normes homogénéisantes, issues de systèmes dominants, influencent l’expérience du corps et de l’espace, en décalage avec la diversité des vécus individuels. S’appuyant sur la notion de défiguration, développée par Évelyne Grossman, le projet propose de questionner et de réinventer les formes conventionnelles afin de modifier l’expérience perceptible. L’objectif est d’esquisser des pistes pour reconnecter l’être à une expérience incarnée et habitée plus sensible et inclusive.
Le projet naît donc de ce terrain, à la croisée de la marge et de la norme. Il interroge une forme d’effacement contemporain : celui des corps singuliers, des expériences dissonantes, sacrifiés au profit d’idéaux esthétiques et sociaux façonnés par une normopathie globale. Et si l’architecture spéculative permettait cela : non pas inventer un ailleurs, mais rendre visible ce qui, déjà, tente d’exister au creux du réel ?
Le projet interroge la manière dont l’architecture peut révéler la vie en s’affranchissant de l’enveloppe, entendue comme limite physique, mais aussi symbolique et sociale. Implanté dans les interstices formés par les quatre tours d’habitation de la place des Flanades, au coeur du grand ensemble de Sarcelles, il explore la possibilité de requalifier les imaginaires collectifs associés au bâti. En retirant l’enveloppe des tours et en superposant une série de filtres translucides, l’architecture brouille la lecture du squelette originel pour y faire émerger une nouvelle forme de présence. Ces strates génèrent des espaces « mid-door », extensions poreuses des logements, où l’intime dialogue avec le collectif. L’alternance de pleins et de vides, de transparences et de jeux de lumière, permet de révéler des couches d’histoires superposées : récits de vies inscrits dans la matière et ancrés dans les réalités actuelles du quartier. En exposant ces présences sous un nouveau jour, le projet propose un renversement du regard porté sur ces lieux, et affirme le potentiel de l’architecture à désamorcer les stigmates par une mise en scène du vivant.